Côte d’Ivoire–Burkina Faso : reprise du dialogue après des mois de tension diplomatique

Samedi 6 Décembre 2025

Après plusieurs mois de vives tensions nourries par l’affaire Alino Faso et des accusations mutuelles liées à la menace terroriste, la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso ont renoué, samedi à Ouagadougou, le fil du dialogue ministériel. Une reprise des échanges saluée comme un premier pas vers l’apaisement entre les deux voisins.


Le ministre ivoirien de l’Intégration africaine, Adama Dosso, a été reçu par son homologue burkinabè, Jean Marie Traoré, chef de la diplomatie. La rencontre, qualifiée de « franche, sereine et constructive », marque la première initiative d’envergure depuis l’éclatement de la crise diplomatique.

Une reprise des échanges dans un climat lourd

L’initiative ivoirienne intervient dans un contexte particulièrement tendu. Les deux délégations ont abordé sans détour les dossiers sensibles qui ont récemment crispé la relation bilatérale, avec l’objectif affiché de rétablir une confiance durable.

« La Côte d’Ivoire et le Burkina Faso sont comme deux poumons d’un même corps économique et social », a souligné Adama Dosso, appelant à tourner la page des incompréhensions. Jean Marie Traoré a salué « un esprit fraternel conforme à la vision du chef de l’État, le Capitaine Ibrahim Traoré », tout en invitant à consolider ce début de rapprochement.
Ouagadougou a réaffirmé sa volonté de reconstruire une coopération apaisée, fidèle aux liens historiques unissant les deux peuples.

L’affaire Alino Faso, au cœur des crispations

Cette relance diplomatique survient alors que l’émotion reste vive autour de la mort d’Alain Christophe Traoré, alias Alino Faso, décédé le 24 juillet dans une école de gendarmerie d’Abidjan.

Le Burkina Faso a ouvert une enquête judiciaire et conteste la version ivoirienne du suicide, dénonçant un « assassinat crapuleux » et l’absence de notification officielle du décès, annoncée trois jours plus tard sur les réseaux sociaux.

La diplomatie burkinabè a convoqué la chargée d’affaires ivoirienne pour exiger des explications, réclamant le rapatriement du corps et la « pleine vérité » sur les circonstances du décès.

Les accusations du président Ibrahim Traoré

Fin septembre, dans un long entretien diffusé par la télévision nationale, le président Ibrahim Traoré avait ravivé les tensions en accusant Abidjan de conclure un pacte de non-agression avec certains groupes armés.

Selon lui, l’absence d’attaques en Côte d’Ivoire ne signifie pas que « l’armée ivoirienne est surpuissante », mais traduirait plutôt une entente tacite avec les terroristes, faisant du pays une « base arrière ».

Le chef de l’État avait averti que la Côte d’Ivoire pourrait être ciblée en cas de crise interne, rappelant l’attentat de Grand-Bassam en 2016 et plusieurs incursions dans le nord avant l’accalmie observée depuis 2021.

Des relations tendues depuis 2022

Revenant sur les premiers contacts avec Abidjan à son arrivée au pouvoir, Ibrahim Traoré avait affirmé : « Le 30 septembre 2022, Alassane Ouattara a été le premier à m’appeler. Son petit frère est venu deux fois. Ils voulaient que nous suivions une direction. Nous avons dit non. Ils se sont mis contre nous. »

Pour le président burkinabè, ces différends traduisent la volonté d’indépendance du Burkina Faso, qu’il décrit comme « intrinsèquement révolutionnaire ».

Kevin AKA
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