Soins des personnalités ivoiriennes à Paris : Jean Bonin à Kandia Camara, "votre enthousiasme fait mal" à la Côte d'Ivoire

Dimanche 18 Mai 2025

Une lettre ouverte à Kandia Camara, la Présidente du Sénat de Côte d'Ivoire, Jean Bonin (FIER) critique l'accord pour les soins des dignitaires ivoiriens à Paris, évoquant une "cruauté sociale" et des privilèges.


Jean Bonin (FIER) interpelle Kandia Camara, la Présidente du Sénat de Côte d'Ivoire sur l'accord sanitaire avec l'Hôpital Américain de Paris © Crédit photo DR
Accord pour les soins des dignitaires ivoiriens à Paris : La santé en Côte d'Ivoire est de nouveau au cœur d'un débat public suite à la diffusion d'une lettre ouverte rédigée par Jean Bonin Kouadio, président de l'association FIER (Front Ivoirien pour l'Égalité Républicaine). Adressée directement à Madame la Présidente du Sénat, cette correspondance officielle critique vivement l'enthousiasme exprimé par cette dernière concernant un accord sanitaire spécifique avec l'Hôpital Américain de Paris.

L'accord controversé permettrait aux plus hauts responsables de cinq institutions étatiques ivoiriennes, ainsi qu'à leurs conjoints et enfants, de bénéficier de soins médicaux "à moindre coût" au sein de cet établissement parisien, connu pour être parmi les plus onéreux au monde. M. Bonin qualifie les propos de la Présidente de "légèreté inquiétante, mais surtout d’une cruauté sociale inacceptable."

"Votre enthousiasme fait mal"

Dans sa lettre, Jean Bonin Kouadio met l'accent sur l'impact émotionnel et social des déclarations de la Présidente du Sénat sur une population confrontée à des difficultés quotidiennes d'accès aux soins. "Votre enthousiasme fait mal," écrit-il de manière directe, avant d'illustrer son propos : "Il fait mal à celles qui accouchent sur des bancs en bois dans des centres de santé ruraux sans sage-femme."

Le président de FIER poursuit en évoquant la détresse "de ces familles qui vendent leur terrain ou s’endettent pour sauver un enfant souffrant d’insuffisance rénale, faute de centre d’hémodialyse à proximité." Il considère que cette situation et l'annonce de l'accord pour les élites "révèle que ceux qui gouvernent n’ont pas l’intention de partager le sort de ceux qu’ils gouvernent."

Privilèges et discrédit sur les politiques publiques

La lettre ouverte soulève une contradiction apparente entre le discours officiel et les actions des dirigeants. Alors que le ministre de la Santé, selon M. Bonin, assure que la Côte d'Ivoire a massivement investi pour que ses hôpitaux n'aient "rien à envier à ceux de l’Occident," le juriste s'interroge : "comment comprendre qu’au moment même où l’on affirme cela, nos dirigeants préfèrent aller se faire soigner… à Paris ?"

Pour le président de FIER, la déclaration publique de la Présidente du Sénat a non seulement "jeté le discrédit sur les politiques publiques de santé," mais a surtout "rendu visible un système de privilèges qui fracture encore davantage le lien entre les élites et le peuple." Il exprime son choc que ce privilège soit évoqué "avec fierté, comme si le privilège de classe devenait une récompense légitime."

FIER demande la suspension de l'accord

Face à ce qu'elle considère comme une injustice, l'association FIER, par la voix de son président, "appelle à une prise de conscience urgente". Elle formule des demandes précises, au premier rang desquelles figure "la suspension de cet accord inique entre les institutions ivoiriennes et l’Hôpital Américain de Paris."

En complément, FIER demande "l’adoption d’une loi encadrant strictement les prises en charge médicales à l’étranger pour les agents de l’État, réservées aux seuls cas de force majeure." Jean Bonin Kouadio conclut sa lettre en rappelant que "les grands pays ne sont pas ceux qui soignent leurs élites à Paris. Ce sont ceux qui soignent dignement leurs pauvres à Korhogo, à Odienné, à Bondoukou ou à Gagnoa," et insiste : "La santé, Madame, n’est pas un luxe. C’est un droit."

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